L’anamorphose existe depuis très longtemps mais cela fait quelques années que cette technique de trompe-l’œil prend de l’ampleur et s’immisce de plus en plus dans tous les aspects de nos vies : art, signalétique, architecture, musique, pub, logo, etc. Les effets d’optique ont, de tout temps, suscité l’intérêt des créateurs. L’anamorphose, elle, tient son nom du grec anamorphoûn signifiant « transformer ». C’est un procédé d’illusion d’optique qui consiste à voir une image qui paraît totalement difforme quand on la regarde normalement et dont les justes proportions ne sont visibles qu’en étant regardées, soit sous un angle précis (anamorphoses par allongement), soit indirectement, dans un miroir cylindrique, conique, etc.

La première méthode est apparue dans le milieu de l’Art à l’époque de la Renaissance tandis que « l’anamorphose à miroir » s’est développée à partir du XVIIème siècle. Historiquement, on considère que ce principe d’illusion d’optique résulte des applications des travaux du mathématicien Italien Piero della Francesca. L’un des plus anciens et des plus célèbres exemples d’anamorphose est le tableau « Les ambassadeurs » de Hans Holbein peint en 1533. Il comporte en effet un crâne caché au premier plan qui ne peut être vu que si l’on se positionne sur le côté.


Mais bien que l’anamorphose ne soit pas une chose nouvelle, elle continue d’émerveiller et est aujourd’hui une vraie tendance que les artistes et graphistes ne se privent pas d’utiliser, pour notre plus grand plaisir. On peut notamment citer Jonty Hurwitz, qui a réalisé une œuvre atypique, la sculpture Kiss of Chytrid, qui représente une grenouille en anamorphose à miroir.

Il y a également la « Piscine » de Julian Beever réalisée dans les rues de Glasgow en 2006.


L’artiste Scott VanderVoort a quant à lui réalisé une œuvre dissimulée dans les rues de New York en hommage à David Bowie.
Et, plus récemment, ce sont les cercles de l’artiste contemporain Suisse Felice Varini pour célébrer les vingt ans de l’inscription au patrimoine mondial par l’Unesco de la Cité de Carcassonne qui ont attiré l’attention.

Les centres commerciaux et les entreprises s’y mettent également, car l’anamorphose est aussi une façon de donner du relief au quotidien. En 2017, le centre commercial Bercy 2 avait donné carte blanche à douze artistes internationaux pour réaliser une exposition de fresques en trompe-l’œil au sein de sa galerie marchande.

Et l’entreprise de biotechnologies Amoéba a habillé ses locaux à Lyon en réalisant l’anamorphose de son logo dans un long couloir de 30 mètres de long et de 8 mètres de haut.


Ce même principe a également inspiré l’hôpital Salvator à Marseille qui a inscrit le mot « Rêve » dans l’un de ses couloirs.


Même Instagram a sauté le pas à l’occasion du premier tour de l’élection présidentielle française de 2012. La multinationale a en effet décidé de participer à la campagne en créant différents visuels représentant la paix, l’égalité, la liberté, ou la fraternité sur la passerelle Léopold Sedar Senghor, près des Tuileries à Paris.


Et la publicité et la musique n’échappent pas au phénomène comme le prouve l’exemple du spot pour le parfum Lacoste L!VE qui met en avant une anamorphose imaginée par le célèbre street-artist Français Zoer.
https://www.youtube.com/watch?v=rUnEUXLQ2Go
Procédé que l’on retrouve également dans la campagne et l’identité de la chaîne Russe 7TV réalisée par le graphiste Suisse Greg Barth, ainsi que dans le clip « The writing’s on the wall » du groupe de rock Ok Go américain connu pour l’inventivité et l’excentricité de ses clips vidéo.
Mais l’anamorphose n’est pas que graphique, elle est aussi utile. Pour la scénarisation de la galerie de liaison de l’extension de l’aéroport de Lyon, l’agence Graphéine avait en effet imaginé un design narratif en anamorphose afin de diminuer la sensation de durée du parcours (250 mètres). Ce projet non retenu par l’aéroport mettait en exergue qu’en avançant, l’anamorphose se déconstruisant, une sensation de vitesse apparaitrait, les notions du temps et de l’espace s’en trouveraient poétiquement altérées, réduisant par la même occasion la sensation de durée du parcours.


Cette utilité de l’anamorphose se retrouve également dans la signalisation routière. Peinte directement sur le sol, elle fait également appel à ce procédé afin que les usagers de la route aient une vue non-déformée d’une image ou d’un texte lorsqu’ils se situent à une certaine distance. C’est notamment le cas pour indiquer une piste cyclable qui représente un vélo qui semble étiré en hauteur quand on le regarde vu du dessus.

Enfin, plus dernièrement, dans le monde du street art, c’est JR qui a réalisé une œuvre collaborative nommée « Le secret de la Grande Pyramide » avec l’aide de 400 participants, ce qui constitue son plus grand collage installé à ce jour. Après avoir fait disparaître la Pyramide du Louvre en 2016, l’artiste Français mondialement connu pour ses collages photographiques, a cette fois-ci conçu une anamorphose à l’occasion du 30ème anniversaire en mars dernier du monument emblématique imaginé par Ieoh Ming Pei.


Le musée le plus visité du monde a ainsi révélé un gigantesque trompe-l’œil représentant symboliquement les fondations de la Pyramide de la cour Napoléon.
